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L’Afrique Francophone Face à ses Défis

 

L’Afrique Francophone Face à ses Défis

Boubacar DIALLO
25/10/2018

 

L’Afrique, en ce début de 3ème millénaire, connaît de profondes mutations. Peut-être plus qu’ailleurs, elle doit faire face à de nombreux défis. Elle accuse un grand retard dans presque tous les domaines, en termes de satisfaction des besoins des populations en matière d’alimentation, de santé, d’éducation, d’infrastructures, d’industrialisation, de transport, d’accès aux technologies, de protection de l’environnement, d’intégration, de promotion d’une gouvernance économique et politique de qualité etc… Tout cela dans un contexte de croissance exponentielle de sa population. Quels sont ces défis ? Que peut-elle et que doit-elle faire pour les relever? Nous avons choisi, pour plus de clarté, de les stratifier et catégoriser car, même s’ils sont tous d’une importance vitale, certains semblent faire le lit des autres. Nous avons retenu cinq défis majeurs : 1/Le défi du changement des mentalités. 2/Le défi démographique, environnemental et du développement durable. 3/Le défi sécuritaire. 4/Le défi de l’intégration africaine. 5/Le défi de la souveraineté monétaire.

1. LE DEFI DU CHANGEMENT DES MENTALITES

Le temps est arrivé pour que les uns et les autres, ne serait-ce qu’un instant, s’arrêtent et s’interrogent, froidement et sans la moindre complaisance, sur ce qui doit changer dans la mentalité et le comportement de l’homme africain, pour lui permettre d’être le maître de son destin. Il est indispensable de s’atteler à cette introspection, personnelle et collective, celle qui consiste à se regarder bien en face, dans le miroir de son comportement au quotidien, sans le moindre compromis.
C’est une lapalissade que d’admettre que c’est la capacité de l’homme à faire le lien entre tous les éléments qui entourent sa vie, à poser les actes qu’il faut pour les maîtriser et les transformer, à se nourrir de son passé et de son présent pour bâtir son avenir, qui en fait l’être le plus évolué du monde animal. Hors de cela, il ne s’éloigne que très peu de celui-là !
Interrogeons-nous sur les raisons qui font que l’Afrique s’est toujours offerte et continue de le faire aux puissances impérialistes qui, froidement, impitoyablement, de façon cynique, en usent et abusent. Cherchons à comprendre les trames de ce lien si particulier, de cette relation presque charnelle et passionnelle, qui la lie à elles, depuis que le premier européen a foulé le sol africain, quelque part dans le Golfe de Guinée, il y a de cela presque six cents ans.

Quels sont les éléments fondateurs de notre personnalité et qui font le moteur de nos actions au quotidien ? Quelles sont les faiblesses qui nous habitent ? Que devons-nous bannir pour devenir des compétiteurs dans un monde où il n’y a pas de place pour les faibles ?
Voilà, entre autres, quelques questions que chaque africain doit se poser pour être en mesure de devenir un homme nouveau dans une Afrique nouvelle, libre, respectée et en mesure d’apporter les meilleures solutions aux problèmes du continent. La bonne vieille sagesse Bamanan, ne nous apprend-t-elle pas que « la meilleure connaissance qu’un homme peut avoir, n’est, ni de savoir monter à cheval, ni de pouvoir grimper sur un arbre, mais c’est de se connaître soi- même ».
En attendant que dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, les sociologues, les historiens, les ethnologues et toutes les têtes bien pensantes de l’Afrique, s’engagent dans une réflexion approfondie, et que les décideurs du futur, usant de prosélytisme au besoin, s’engagent dans la mise en œuvre des solutions pour corriger ce qui doit l’être, nous nous proposons ici, modestement, d’ouvrir quelques pistes de recherches.
« Mal nommer les choses ne fait qu’ajouter à la misère du monde » dixit A. CAMUS.

Il ne s’agit point d’un « afro-bashing », d’autant que les situations sont loin d’être les mêmes d’un pays à l’autre, mais simplement, de poser le diagnostic d’une réalité qu’il est loisible d’observer au quotidien dans nombre d’entre eux.

A l’évidence, l’africain doit nécessairement opérer sa reconversion mentale.

Aussi loin que l’on peut remonter dans les relations entre l’Afrique et les puissances impérialistes qui l’ont réduite à l’esclavage, pour ensuite la coloniser, on relève que celles-ci, par leur savoir-faire, au rythme des périodes historiques, ont toujours su trouver et adapter leurs moyens et techniques d’intervention.

Ceux-ci reposent, depuis toujours, sur la même vision, la même constance: un continent habité par des sous-hommes qui n’ont d’autres destins que celui d’être à leur solde. Ce racisme, dont se délectent les partisans de la théorie «du sang bleu», n’existe pas seulement entre individus, mais est, aussi, à la base des relations entre l’occident et l’Afrique Noire. Ceci se vérifie autant hier qu’aujourd’hui !
A la brutalité de l’esclavage et de la colonisation, se sont substituées, aujourd’hui, des méthodes plus insidieuses et hypocrites, qui s’exposent au grand jour chaque fois que les circonstances s’y prêtent.

Etablissons alors une fois pour toute que la responsabilité des puissances impérialistes dans la Traite des Noirs, dans la colonisation de l’Afrique, dans l’octroi des indépendances de façade et, enfin, dans la pseudo démocratie africaine, est absolument indéniable. La situation de pauvreté et de sous-développement de l’Afrique en sont une conséquence directe. Les pourfendeurs du colonialisme et du néocolonialisme l’ont suffisamment démontré, sans qu’il soit nécessaire d’insister outre mesure.
Mais établissons, aussi, une fois pour toute, qu’il faut éviter de tomber dans la tentation trop facile de croire que l’enfer, c’est toujours les autres et que ces puissances coloniales, sont seules responsables de la situation de faillite générale du continent noir.
Il est juste de relever que l’Afrique elle-même doit porter sa propre croix. Sa responsabilité est comparable, à tous égards, à celle de ces puissances. Elle doit reconnaître aujourd’hui sa part de responsabilité historique vis-à-vis de ces phénomènes qui l’ont dépeuplée, l’ont pillée et modifiée profondément et définitivement son évolution normale, en créant les conditions de son extrême pauvreté.
Pourquoi fallait-il qu’il en soit ainsi ? Qu’est ce qui explique cette situation ? Quelles dispositions avons-nous développé et entretenu pour que la situation en soit encore à celle que nous vivons aujourd’hui ?

En premier lieu, on relèvera que les africains depuis les premiers contacts avec les colons, ont toujours été sensibles à la brillance des objets venus d’occident,qu’il s’agisse des miroirs, des verreries, de sabres, de mousquets etc… Ces pacotilles, avec en sus les boissons enivrantes comme le rhum, que les négriers transportaient dans la cale de leurs bateaux, servaient de monnaie d’échange avec les chefferies régnantes de ces contrées contre des esclaves. Il faut reconnaître que l’esclavage n’a pas été du seul fait des négriers. Il a toujours existé en Afrique et résulte des guerres internes et des razzias de certaines tribus. La pratique de l’esclavage a toujours été ancrée dans la mémoire et le comportement de beaucoup de peuples africains, notamment dans les régions soudano-sahéliennes. D’ailleurs, un des derniers pays au monde à l’avoir aboli (et encore… !) fut, précisément, un pays africain, la Mauritanie, seulement en 1985. Cette Traite n’aurait donc jamais été possible, avec une telle ampleur, sans la complicité des africains eux-mêmes. Ces puissances impérialistes n’ont jamais, vraiment guerroyé pour asservir ces esclaves, ni ne les ont volés pour les transplanter dans le nouveau monde. Par leur savoir-faire, fondé sur la malice, la duperie ou quelque fois, la violence, ces négriers ont su exploiter, pendant des siècles, les faiblesses de l’africain.

Plus aujourd’hui qu’hier, du fait des progrès technologiques qu’il a réalisé, l’Occident qui, continuellement, élabore, transforme, crée de plus en plus de richesses, maintien et nourrit chez l’africain cette boulimie du clinquant et de la brillance, en l’excluant autant que possible de son élaboration. Aussi, ce dernier importe-t-il à tour de bras toutes sortes de gadgets dont, souvent, il ignore l’essentiel des possibilités. L’important étant de pouvoir les exhiber et se voir conférer, ainsi, un statut particulier.

Qu’il est amusant de voir cette suffisance qui s’affiche dans l’allure et dans les gestes du nouveau parvenu africain : on en rit presque, quand on devrait plutôt en pleurer !
La maitrise de l’outil de production peut attendre et les plus-values qu’elle génère restent à ceux-là qui s’en sont donné la peine.

L’Afrique « des indépendances », qui n’a que des produits de base, n’a jamais pu réaliser le transfert des technologies qui lui aurait permis, sinon de participer au commerce international des produits de consommation courante, du moins, de satisfaire ses propres besoins internes.

Sensible à la brillance des objets, l’africain l’est également au chant des sirènes, susurré à son oreille, auquel il s’accroche mordicus, sans jamais être capable de réfléchir par lui-même et de chercher à comprendre et à saisir l’essence des choses qui conditionnent sa vie.
La pénétration coloniale a été rendu possible grâce à l’art consommé des missionnaires, explorateurs et militaires occidentaux qui, à coup d’intrigues, de trahison et de félonie, ont pu réduire à la domination des Etats normalement constitués dont certains étaient, à l’époque, très puissants.
Pour pouvoir réduire les résistants, au Soudan (l’actuel Mali), ils ont su opposer les Royaumes du Kénédougou, de Ségou et de l’Almamy Samory Touré. Si seulement ceux-là avaient bouché leurs oreilles au chant des sirènes d’Archinard et de ses soldats, comme Ulysse et ses marins, cette partie de l’Afrique aurait sans doute connu une évolution autre.
La colonisation s’est faite avec l’appui des africains, soit en tant que bras séculier (soldats, interprètes, gardes, commis et gens de maisons), soit en tant que chefferies désireuses de conserver leur statut.
Les quelques farouches résistances politiques et religieuses, n’ont été, somme toute, que des combats d’arrière-garde qui sonnaient le glas de l’Afrique ancestrale.
Une autre Afrique naissait…. !
Avec « les indépendances », ces chants des sirènes ont trouvé les échos les plus favorables. La manipulation politique, magistralement exécutée par ces puissances, devient une arme redoutable. L’Afrique, aujourd’hui, vit au rythme des promesses, des conseils occultes , des flatteries et parfois des menaces qui l’amènent à rester toujours tributaire des décisions qui se prennent dans les capitales de ces grandes puissances, et cela, dans tous les aspects de sa vie au quotidien , qu’il s’agisse du choix de ses leaders, des investissements réalisés, des programmes de coopération mis en œuvre et du choix de valeurs sociétales.
Et depuis, l’africain n’a cessé d’entretenir sa déculturation, convaincu que tout ce qui vient d’Occident doit être la référence absolue.

Et par ricochet il en est arrivé à développer un solide complexe d’infériorité.
Du missionnaire au colonisateur, du commerçant au Coopérant, l’occidental a toujours reçu et continu de recevoir, en Afrique, un traitement privilégié. Dans son subconscient, l’africain, par-delà les siècles, a définitivement admis la suprématie des « oreilles rouges ».
A tous les niveaux de la pyramide sociale, ce complexe d’infériorité s’observe et se vit au quotidien. De l’Afrique colonisée à l’Afrique indépendante, rien n’a véritablement changé dans cette perception de l’occidental par les africains.
Crédule, l’africain, au-delà de la légendaire hospitalité africaine, (terranga, térya ou diatiguiya ), a toujours été prompt à lui donner sa confiance, à l’accréditer de toute la bonne foi, à l’accueillir avec générosité et enthousiasme, en lui ouvrant toutes ses portes et lui faisant partager tout ce qu’il possède, allant jusqu’à la servilité .
De cette crédulité, l’occidental, rationnel, froid, cynique, impitoyable, a toujours su et continue de tirer le meilleur profit. Au fil du temps, cette exploitation de la naïveté africaine, constamment réadaptée en fonction des périodes historiques, s’affine, de plus en plus, et donne lieu à toutes sortes de manipulations. Ainsi l’africain, depuis cinquante ans, joue à « cette cavalcade sur une tige de mil » que connaissent si bien, les enfants dans les villages africains du Sahel.
Le goût prononcé pour le mimétisme est partout perceptible. L’africain consomme à satiété, sans jamais assouvir sa faim, le mode de vie et de pensée des occidentaux ; qu’il s’agisse de cette belle négresse dépigmentée, dont le combat quotidien consiste, au moyen de divers artifices, à faire disparaitre l’âcre odeur de sa peau brulée ; de ce dandy congolais arpentant les rues habillé en kilt écossais, de ce ministre qui impose le port de la cravate même si les costumes sont mal taillés ou mal assortis.
Vivre et penser à l’occidental devient le credo d’une nouvelle classe composée des cadres politiques, administratifs, militaires et compradors en mal de promotion sociale.
Comme un enfant s’émerveillant devant des jouets qui ont si longtemps hanté ses nuits, cette nouvelle classe a appris, à découvrir les ivresses et les délices du pouvoir, la magnificence des apparats, l’intense luminosité des feux de la rampe…
Qu’importe si dans les grandes rencontres internationales on ne fait partie que du décor. L’essentiel pour beaucoup est de participer et de découvrir, en marge de ces rencontres, les plus belles avenues du monde , les Champs Elysée et l’interminable Broadway avec leurs affiches fluorescentes, invite irrésistible pour celui-là qui, à force d’intrigue, de délation, de courtisanerie, a su échapper à la chaumière enfumée, à l’inconfort des bidonvilles et des quartiers populeux .
Calfeutrée dans des demeures cossues, qui poussent comme des champignons, elle regarde, d’un œil assassin, le « cousin » du village foulant, dans son ignorance, avec ses sandales malodorantes, le tapis persan ramené d’un des multiples voyages à travers les continents. Le prix de ce persan suffirait à nourrir, pendant plusieurs mois, « la famille » dont chaque membre, sous l’implacable soleil d’Afrique, a sué sang et eau, pour permettre à l’un des leurs d’aller à l’école du village, de la ville et plus tard par-delà les océans.
Pour un portefeuille ministériel même de quelques mois, ou pour le moindre décret de nomination, cette nouvelle nomenklatura s’adonne à toutes sortes de compromission : les incantations des charlatans, faiseurs de miracles, la dévote communion des « marabouts » avec Dieu, l’obséquieuse courtisanerie auprès des princes du moment, dont du reste, elle se détournera sans scrupule dès lors que la fortune leur est contraire.
Par les moyens les plus divers et sous le soleil d’Afrique, qui incite au « farniente », elle cherche à prendre le temps de goûter aux douceurs de la vie occidentale, au dedans ou au dehors, d’autant que circule l’argent facile provenant des dessous de table des marchés publics, des prébendes et autres avantages occultes et, peut-être de la drogue.

Sait-on jamais, l’argent n’ayant point d’odeur et les appétits étant si grands !

Le poète peut continuer à chanter sa négritude; mais l’africain « blanc » découvre de plus en plus que le rituel Massaï ou le vrombissement du « Komo » (société sécrète Bamanan), dans la nuit noire, appartiennent à un passé qui s’éloigne …

C’est de là, assurément, que naît cette culture de l’apparence qui est absolument phénoménale en Afrique et qui fait le lit de tant de maux dont elle souffre. Pour l’africain, il faut paraitre. Il aime donner de sa personne, une image extérieure très positive. C’est son apparence qui détermine son statut social, surtout dans sa frange féminine, où l’exhibitionnisme est la règle dans les multiples manifestations sociales, (mariages, baptêmes funérailles et autres concerts).
Dans les meetings politiques, l’apparat est de mise jusque dans les villages les plus reculés. Ils donnent lieu à un étalage de tenues « griffées » de grands couturiers, dont la valeur suffirait à nourrir, une année durant, ces braves populations qui, depuis cinquante ans, continuent de danser allègrement au son des tamtams et balafons.
Cette culture de l’apparence l’amène, aussi, à répéter, comme un perroquet, ce qu’il apprend de l’Occident. Il se contente de toutes idées qu’on lui propose, sans jamais être véritablement capable d’opposer la moindre critique voire de les infléchir à son avantage. Ainsi se contente-t-il d’avaler des couleuvres pourvu que le langage soit approprié et lui permette de faire bonne mesure dans les assemblées politiques.
Son standing se reflète aussi dans sa structure de consommation. Elle est fascinante cette attirance qu’ont les africains pour les belles mécaniques, les villas cossues, les restaurants « class », les tenues griffées, pour une certaine catégorie et, pour d’autres, les rebuts de l’Occident, destinés à la casse et qui deviennent des objets de fierté et de réussite sociale pour l’acquéreur.

Cette disposition serait moins stigmatisante si elle ne s’accompagnait pas de sa tendance à fournir le minimum d’efforts.

L’africain ne travaille pas, ou pas assez !
Il se contente de faire le minimum préférant s’en remettre à la nature : ici, une pluie de plus ou de moins conditionne son existence pendant une année entière ; là, les richesses de la forêt suffisent à faire son bonheur.
L’africain ne travaille pas ou pas assez !
Dans certaines régions, il est admis que les femmes doivent travailler plus que les hommes : elles sont dans les champs, dans les rizières, dans le ramassage du bois de chauffe, du matin au coucher du soleil. Elles deviennent de véritables bêtes de somme. Pendant ce temps, assis à longueur de journée, jusque tard dans la nuit, sous l’arbre à palabres, les hommes bavardent bruyamment, leur machisme consistant, entre autre, au cours de ces assemblées quotidiennes, à crier plus fort que tous les autres
L’africain ne travaille pas, ou pas assez !
Comment comprendre qu’avec l’immensité de ses potentialités agricoles et pastorales, de nombreux pays africains continuent d’importer plus de cinquante pour cent de leurs besoins alimentaires et de tendre leur gamelle auprès de la FAO et autres « pays amis », lors des épisodes récurrents de famines ?
Face à ses potentialités hydrauliques, comment comprendre que les besoins en électricité ne soient couverts qu’à hauteur de moins de cinquante pour cent, que les délestages et autres avaries fassent partie du quotidien de l’africain.
Comment comprendre qu’avec ses potentialités minières et minérales, la très grande majorité des pays africains reste classée en queue de peloton de l’indice de développement humain (PIB/habitant, espérance de vie à la naissance, niveau d’éducation des enfants de 15 ans et plus).
Comment comprendre que ses bras valides, en exode dans les grandes villes qui deviennent de plus en plus tentaculaires, choisissent d’arpenter les rues en vendant toutes sortes de pacotilles produites sans fin par la plus grande usine du monde contemporain, la Chine, au grand dam de l’Occident ?

On pourrait, comme dans une litanie, égrener sans fin les preuves que l’Afrique souffre de son refus de travailler, de son indolence et de son manque de pro activité. Il a, dans sa paresse, choisi d’ériger la mendicité en principes de gouvernement et devient, pour reprendre ces mots de Julius NYERERE «un mendiant assis sur un sac d’argent ». Il excelle dans la politique de la main tendue pour recevoir «des aides» sous les formes les plus variées, allant de l’aide budgétaire au financement du moindre projet de quelques petits millions.
Dans maints pays, cette mendicité est devenue un mode de vie auquel personne n’échappe. En Afrique il faut savoir partager !

Cette autre disposition de l’africain qui amplifie son infortune, réside dans cet esprit de prédation qu’il ne cesse d’entretenir.

Cet esprit, qui est inscrit dans les gênes de l’homme, en général, se trouve aggravé, en Afrique, par le facteur culturel, mais pas seulement.
Dans les régions soudano-sahéliennes en particulier, cet esprit est glorifié par les griots qui, depuis toujours, sont les dépositaires de la tradition. Le courage, la bravoure, les hauts faits se mesurent à l’aune de la capacité de destruction d’un individu. Dans ces contrées soudano-sahéliennes, il est impossible que l’africain résiste à être comparé à « l’éléphant dans un champ de mil » !
Cet esprit de prédation se constate à plusieurs niveaux : qu’il s’agisse de la destruction du couvert végétal par les feux de brousse ou la coupe des arbres, de la pollution des cours d’eau, du braconnage qui détruit la faune, des eaux usées déversées dans les rues, des caniveaux transformés en dépôt d’ordures ménagères.
Il s’observe aussi dans la destruction des biens publics ou privés à la suite de n’importe quel événement politique ou social etc.
Cet esprit de prédation se trouve aussi dans son incapacité à conserver le moindre acquis de la société.

Quand, lors du Tour de France, ce pays peut présenter fièrement ses châteaux dont certains frôlent le millénaire, on relève, avec beaucoup d’amertume, que la trace visuelle des Empires précoloniaux est quasiment inexistante. Et que dire des archives et autres éléments fondateurs de la mémoire collective, les changements de régime, les soubresauts politiques s’accompagnant souvent, de la destruction des biens se rattachant à l’ordre ancien.
La liste est sans fin tant l’africain se complaît dans cette négation, sans le moindre respect ni pour lui-même, ni pour son environnement, ni encore moins pour son pays !
Et que penser de son caractère docile, son incapacité à se révolter, à entrer en rébellion contre un ordre injuste.
Ceci l’amène à tout accepter, à se soumettre à tout.
Les dérives auxquelles on assiste dans les pays indépendants et démocratiques d’Afrique, en sont la conséquence, même si parfois, éclatent, çà et là, des rébellions et autres formes de protestations. Et si d’aventure, certaines formations politiques s’emparent des courants contestataires, c’est davantage pour monnayer des places sur l’échiquier politique du pays, par l’obtention de portefeuilles ministériels, de quelconques strapontins administratifs ou des enveloppes bien remplies, balayant, vite fait, les derniers scrupules, si tant est qu’ils aient jamais existés !

Enfin, on relève l’incapacité de l’africain à se projeter dans le long terme.
Il vit dans le présent ou dans l’avenir immédiat.
Ceci se vérifie particulièrement au plan politique.
Le monde actuel se caractérise par de nombreux changements qui nécessitent, constamment, la redéfinition des intérêts de tous les pays et l’actualisation de leurs politiques en fonction de ceux-ci.
La France, comme bon nombre de Nations occidentales, subit les effets la crise financière internationale depuis une décade. Entre les exigences de l’Union Européenne en matière de politique budgétaire, les remous sociaux qui se radicalisent de plus en plus, les partis extrémistes xénophobes qui prennent chaque jour un peu plus de place, la concurrence des pays émergents, on peut se demander de quel poids crédite-t-elle l’Afrique, exception faite des pays africains producteurs de pétrole. Il serait intéressant de savoir comment ses stratèges vont pouvoir concilier toutes ces exigences avec sa politique africaine, si tant est qu’elle en ait encore une.
Beaucoup d’interrogations demeurent.
Est-ce un signe si des icônes de la Françafrique, se trouvent dans le collimateur de la justice française pour possession de châteaux dans l’hexagone ?
Inimaginable du temps des Mitterrand et Chirac !
Face à ces questionnements, comment les Etats africains réagissent-ils ? Comment les pays africains perçoivent-ils les scories dont a parlé, récemment, François FILLON ? Quelles politiques alternatives prévoient t-ils ?
Autant de questions qui demeurent sans que rien dans le ciel africain ne laisse transparaître la moindre volonté d’engager le continent dans la prise en charge de son destin.
L’Afrique reste figée dans son irréductible suivisme, dans sa paresse surtout intellectuelle, dans son attentisme habituel qui l’empêche de se projeter dans le temps. Comme toujours, dans son absence de pro activité, dans son refus de penser par elle-même, elle attend et attend encore, qu’on lui indique, le chemin à suivre.
De nouveau, elle s’apprête à subir les évènements, en laissant à d’autres, le soin de décider de son sort et de son avenir !
Usant à merveille de cette connaissance profonde des faiblesses de l’africain, les anciennes puissances coloniales, dont le génie inventif n’a pas de limite, ont mis au point toutes sortes de moyens pour apprivoiser, domestiquer, et conditionner les africains.
L’une de leurs armes favorites est le dressage des africains à s’autodétruire, sauvagement et impitoyablement contre la récompense d’un petit morceau de sucre: l’argent, mais aussi, une parcelle de pouvoir !
Pavlov ! Le réflexe conditionné ! L’art du dompteur !
Dans cette domestication de l’Afrique, l’ancienne puissance coloniale des pays francophones, a toujours été à la pointe, depuis le sinistre commerce triangulaire qui a fait, pendant des siècles, la richesse des ports de Bordeaux et de Nantes, jusqu’aux grandes messes de la France-Afrique, point d’orgue des relations franco-africaines. Elle a toujours su admirablement jouer sa partition en inventant à chaque période des concepts nouveaux : avant hier, la mission civilisatrice, la bible dans une main le fusil dans l’autre, hier, la décolonisation par l’octroi, à tour de bras, des indépendances de façade à ces anciennes possessions africaines et, aujourd’hui, une démocratisation, à tous égards, mal préparée et, parfois canalisée dans le sens de ses intérêts. Les méthodes d’intervention ont toujours été constantes : duplicité, fourberie, tartuferie, chantage, interventions militaires etc…en sont les maître-mots.
Au fil du temps, celles-ci se sont affinées en raison de l’ouverture du monde qui voit apparaître de nouvelles méthodes: manipulation de l’opinion, désinformation, lynchage, matraquage médiatique sous le couvert du Droit International.
La Communauté Internationale, aussi, s’invite dans l’exercice de la démocratie africaine.
On peut concevoir que l’Europe et particulièrement la France veuille maintenir son influence en Afrique ; c’est presque dans l’ordre normal des choses compte tenu des liens séculaires qui les unissent. On pourrait même y trouver beaucoup d’aspects positifs, si les rapports étaient plus équilibrés et fondés sur un respect mutuel et une volonté de progresser ensemble. Mais pour cela, il faut des interlocuteurs africains crédibles, des dirigeants éclairés, capables de mettre l’intérêt de leur pays au-dessus de tout. Sinon, pourquoi ferait-elle autrement ?
Le respect et la considération ne se quémandent pas et ne s’achètent pas ; ils se méritent.
Plus que de consommer à satiété les modèles venant d’ailleurs, l’Afrique doit chercher à extirper les causes réelles de sa pauvreté, au lieu de s’en satisfaire et de la vendre continuellement.
L’Afrique doit nécessairement s’engager dans l’identification et l’évaluation de ses forces et de ses faiblesses, de combattre ses tares et ses insuffisances, d’innover et d’imaginer des solutions alternatives à la situation actuelle du continent.
L’indigence intellectuelle reste une des causes de son grand retard : la pauvreté africaine est, d’abord et avant tout, une question d’état d’esprit. Faute de croire en ses capacités, l’Afrique, après cinquante ans d’indépendance, reste le continent du mal développement !
Elle se doit d’opérer sa reconversion des mentalités.
Celle-ci ne se peut, que si elle arrive à sécréter des leaders en phase avec leur peuple, désireux de changer l’ordre des choses et capables de mobiliser les compétences nationales, que celles-ci soient internes ou externes. L’Afrique n’a plus aucune raison de ne pas croire en elle-même, en ses capacités matérielles et surtout humaines pour résister aux puissances néocoloniales qui tirent leurs forces de ses faiblesses. Tous ces maux qui l’assaillent ne sont nullement génétiques. Les causes sont surtout à chercher du côté des gouvernances catastrophiques.
Le problème de l’Afrique, n’est ni plus ni moins, qu’un problème de leadership.
Au regard de ce que l’on y observe, on relève que les pays qui progressent le plus ont tous connu, à un moment ou à un autre de leur histoire, des hommes qui ont fait le choix de placer au-dessus de tout, les intérêts supérieurs de leur pays. Elle a besoin des grands hommes, de leur rêve de faire basculer le destin de ce malheureux continent.
Des étoiles filantes ont, quelques fois, furtivement, illuminé le ciel africain.

Des étoiles comme Nelson MANDELA qui a montré à quel point la volonté et la force de caractère peuvent arriver à bout de la plus irréductible des adversités.
Mais que n’a-t-il pas été fait pour le briser, le réduire au silence ?
Des étoiles comme Thomas SANKARA qui, par amour pour son pays et avec une vision claire de l’idéal qu’il lui voulait, a réussi, en seulement trois années, le tour de force extraordinaire de faire de la Haute Volta, quasiment inconnu sur la scène internationale, le Burkina faso d’aujourd’hui, sérieux, fier, travailleur et comptant avant tout sur lui-même. Et bien entendu, comme on pouvait s’y attendre, tout a été fait pour le réduire au silence. Il ne fallait surtout lui laisser le temps de faire des émules. Et on a vite fait de trouver le suppôt africain pour accomplir la sale besogne.

Comme naguère !
Ces étoiles nous ont enseigné que le réveil de l’africain est parfaitement possible, qu’il est en mesure de prendre son destin en main, qu’il a la capacité d’infléchir la trajectoire qui le maintien dans le sous-développement et dans l’assistanat.
Hélas ! Trois fois hélas ! Les étoiles ont déserté le ciel africain, fatiguées sans doute de la solitude.
Mais à bien regarder, on aperçoit une lueur qui brille de plus en plus. Elle a pour nom Paul KAGAME, président du Rwanda, petit pays africain pauvre et presque sans ressources naturelles, ayant connu il y a 25 ans, un des traumatismes les plus effroyables du 20ème siècle. De par sa vision claire, de par son patriotisme et de par son leadership, il a réussi, en si peu de temps, à faire de ce pays tant meurtri, une référence absolue en Afrique dans presque tous les domaines, de la gouvernance à l’économie, de l’éducation à la santé et j’en passe. Mais à lui non plus rien n’a été épargné. Et malgré la désinformation, la diabolisation, la déstabilisation, et contre toutes sortes d’adversités, ce pays se fraye, intelligemment, méthodiquement, inlassablement un chemin vers son développement et force l’admiration et le respect. Que dire de cette prouesse d’avoir pu imposer sa ministre des affaires étrangères comme Secrétaire générale de la francophonie en ayant pourtant il n’y a pas si longtemps, adopté l’anglais comme langue officielle au détriment du français.
On ne respecte que les forts.
Il ne reste qu’à espérer que cette lueur continue de briller et que d’autres étoiles viendront s’y joindre pour dissiper la pénombre et envelopper de lumière cette nouvelle Afrique que nous appelons tant de nos vœux.

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